Foyer paroissial n° 169 : 15 décembre – 15 janvier 1937-38, pages 11-12.
De 1835-1840 Inclus (suite)
Plusieurs habitants anciens « déportés » ou les descendants de quelques uns d’entre eux, d’origine canadienne, accablés par ce désastre, se prévalant d’un prétendu don à l’État par un riche acadien d’un million de francs dont la rente devait être distribuée exclusivement à ceux de Saint-Pierre et Miquelon, s’adressèrent de nouveau au Département comme ils l’avaient déjà fait en 1816 sans aucun résultat, pour entrer en possession de la rente de ce fameux million (4)
Voici la réponse du Ministre du Commerce à son collègue de la marine et des colonies, le 27 avril 1838.
« Monsieur et cher Collègue, j’ai reçu la lettre que vous m’avez fait l’honneur de m’écrire le 17 courant pour m’exposer la détresse à laquelle se trouvent réduits aux îles Saint-Pierre et Miquelon, notamment par suite de la diminution de la prime sur la pêche de la morue et des sinistres causés par le mauvais temps en 1837, un grand nombre de familles dont cette pêche forme l’unique industrie.
Au nombre de ces familles de trouvent des réfugiés canadiens qui, en 1816, furent envoyés par le Gouvernement aux îles Saint-Pierre et Miquelon, et c’est principalement en faveur de ces derniers que des secours sont sollicités ainsi que le paiement d’une rente de 50 000 fr. qui leur serait due par l’état pour intérêts d’un capital d’un million de francs, versé au trésor public par un riche réfugié du Canada, au profit de ses Compagnons d’infortune.
D’après les documents qui existent au Ministère, des réfugiés de Saint-Pierre et Miquelon furent effectivement embarqués pour ces îles lors de leur reddition par l’Angleterre, à l’époque du traité de paix du mois de mai 1814 ; mais les embarcations n’ayant pu arriver à leur destination par l’effet de sinistres de mer, ces réfugiés revinrent en France et furent admis aux secours du Gouvernement.
Quant aux réfugiés du Canada proprement dit, quelques familles ayant réclamé leur admission à ces secours, par une pétition adressée à la chambre des Députés, une décision en date du 18 mars 1820, rendue par le Comte Siméon, alors Ministre de l’intérieur, autorisait leur inscription sur les États de distribution. Depuis lors, ils ont continué ainsi que les réfugiés Miquelonnais, à participer aux crédits législatifs annuels, accordés pour cette nature de secours ; je dois à cet égard, vous faire remarquer, Monsieur et cher collègue, que c’est par une disposition toute d’humanité et de bienfaisance que cet état de choses continue d’exister, car le Dép. de l’Intérieur a plusieurs fois fait connaître au vôtre, que si, pendant l’occupation des îles Saint-Pierre et Miquelon par le gouvernement Anglais, il avait paru juste de secourir les habitants de ces possessions françaises, réfugiés en France, ce secours aurait dû cesser à l’époque où elles ont été rendues à la France ; mais il n’en a pas été ainsi d’après les représentations qui furent adressées par votre Dépt., notamment le 18 décembre 1829 (lettre de M. le Baron d’Haussey, alors ministre de la Marine) ; néanmoins des décisions réglementaires dont l’une porte la date du 18 août 1825 (ministère de M. de Corbière) ont statué que lors du décès des titulaires des inscriptions, les enfants des réfugiés de Saint-Pierre et Miquelon et du Canada n’auraient aucun droit à la réversibilité ; cette disposition, dont vous reconnaîtrez sans doute, comme moi, la juste application, a eu pour principal but de ne pas perpétuer des secours dans des familles qui ont dû, depuis 1816, trouver des moyens d’existence dans une industrie quelconque …
(1) voir F. P. de Janvier 1927. (A suivre)