Foyer paroissial, N° 96 : 15 décembre – 15 janvier 1931-32, page 291-292.
1819 (Suite)
L’attention du Commandant Fayolle, le nouveau chef de la Colonie, se porta tout d’abord sur le port de Saint-Pierre. Il fit construire une : balise en maçonnerie sur la « vache », rocher dangereux situé à l’entrée du Barachois. Sur cette balise, il fit installer une petite galerie susceptible de recevoir un fanal grillé. Il fit mouiller, deux bouées pour signaler deux cailloux situés dans le milieu de la passe du Barachois. Un mât de signaux et une cabane de guetteur furent édifiés sur le morne « La Vigie » Il demanda en France un fanal pour être fixé sur « la pointe à canon », dénommée « pointe au fanal ».
Il entreprit ensuite la construction de la batterie de la Pointe aux Canons qui, le 25 août, pouvait tirer les salves réglementaires pour la fête du Roi.
L’église de Miquelon avait été renversée par un ouragan le 31 août de l’année précédente. M. Fayolle décida de la reconstruire et de bâtir en même temps le presbytère. Les matériaux commandés aux États-Unis étaient rendus à destination le 26 août.
Une dépêche ministérielle du 29 avril 1819 avait avisé le commandant qu’il serait entretenu à Saint- Pierre et Miquelon un instituteur primaire à la solde annuelle de 300 fr. outre la ration de vivres. Le ministre prescrivait de nommer à cet emploi le sieur Coudreville qui l’avait demandé par pétition du 10 novembre 1818, ou tout autre personne qui en serait digne ; M. Fayolle porta son choix sur M. Coudreville qui avait d’ailleurs déjà exercé cette fonction entre 1783 et 1793.
L’ouverture de l’école, précédée d’une messe chantée, eut lieu le 10 juillet 1819, avec 18 enfants. L’augmentation du nombre des élèves était prévue pour l’automne, après la pêche.
Le chef de la colonie en rendit compte au Département dans une lettre du 1er août : « J’ai déjà fait, dit- il, quelques visites dans cet établissement où règnent le bon ordre et la décence. Je suis persuadé que je n’aurai que des témoignages de satisfaction à rendre à V. E. sur le compte de l’instituteur qui, parmi ses jeunes élèves, en a quelques-uns qui développent de l’intelligence et de la bonne volonté.
L’ordonnance royale du 1er mai 1819 concernant les concessions de graves aux îles Saint-Pierre et Miquelon était promulguée dans la colonie le 30 juillet suivant. C’est qu’en effet, en raison de la pêche de la morue qui exige de vastes sécheries sur les rivages, les graves du petit archipel ont présenté jusqu’à une époque encore assez récente, une importance exceptionnelle dont l’usage devait être nécessairement réglementé par le pouvoir central sous forme d’arrêtés, d’ordonnances ou de décrets.
En légiférant sur cette matière, le gouvernement de Louis XVIII avait pensé qu’il convenait de se borner à faire exécuter l’arrêté du 14 ventôse an II dont les dispositions lui paraissaient garantir suffisamment les droits des détenteurs à l’époque dont il s’agit, ceux des tiers et enfin les intérêts de l’État. L’ordonnance du 12 mai 1819 a été successivement modifiée en 1833. 1861 et 1927. Ces actes, sauf le dernier, légifèrent aussi sur les concessions de terrains autres que les graves.
Nous savons que les premiers colons qui vinrent dans les îles, en 1816, construisirent leurs maisons avec les matériaux fournis par le gouvernement. Or plusieurs concessionnaires ayant quitté la colonie les années suivantes sans avoir remboursé la valeur de ces matériaux, avaient cependant vendu ou affermé leurs maisons. Le commandant avait néanmoins fait rentrer habitations et terrains au Domaine, d’où nombreuses réclamations des intéressés. Le ministre mit fin à cet état de choses, en prescrivant, par dépêche du 21 avril 1819, que les maisons construites avec les matériaux de Roi ne pouvaient être affermées ou vendues par les chefs de famille qui avaient quitté la colonie sans s’être acquittés des avances qui leur avaient été consenties. Ils ne conservaient donc aucun droit de propriété; et par le fait même de leur départ, elle retournaient au Domaine. Dans le but de favoriser l’accroissement de la pêche, ces maisons pouvaient être vendues à d’autres par le gouvernement local et à son profit.