Samedi 5 novembre 1898. – Journal Officiel des Iles Saint-Pierre-et-Miquelon.
N° 45, 33e année.
Jeudi dernier ont eu lieu à l’Ile aux Chiens les obsèques de M. J. Lamusse, maire de l’Ile aux Chiens. Une assistance nombreuse avait tenu à rendre les derniers devoirs à cet homme de bien.
La cérémonie religieuse, dans la modeste église de l’île, a été particulièrement imposante. On ne s’attendait pas à trouver une maîtrise, composée mi-partie de jeunes gens et de jeunes filles de la localité. qui, par la justesse de leurs voix, donnaient aux répons un charme qu’ils n’ont pas d’habitude. Le libera chanté sur un air différent de celui qu’on a coutume d’entendre a témoigné d’efforts dont il est juste de faire remonter l’initiative à M. le cure Métayer.
Au cimetière, les prières finies, M. le Gouverneur p. i. a prononcé les paroles suivantes :
Messieurs, –
En venant accompagner Jacques Lamusse à sa dernière demeure, nous avons sous les yeux l’exemple d’une vie modeste mais bien remplie.
Lamusse était né en France, aux environs de Granville; il habitait la colonie depuis de longues années, d’abord à St-Pierre où il s’était établi commerçant, puis il vint il y a quelque vingt ans, si je ne me trompe, planter sa tente à l’Ile aux Chiens qu’il n’a plus quittée. Nommé Maire de cette commune depuis le 11 mai 1892, il a accompli tout le bien qu’il a pu. Il apportait dans ses fonctions des habitudes d’ordre, d’économie et de vigilance qui sont toutes à son honneur.
Il s’intéressait à ses administrés, à leur fortune si variable sur mer, à leurs ambitions jamais en proportion avec les résultats. Il fallait l’entendre dire : « la petite pèche ne va pas ! » pour se rendre compte de la sollicitude qu’il portait à l’industrie de l’île. Pour lui la petite pêche n’allait jamais au gre de ses désirs, et les pêcheurs de l’île aux Chiens eussent-ils pêché 100, 200. 300 quintaux. du moment qu’il restait une morue dans l’eau, la mer frustrait ses administrés. Pour que la petite-pêche allât, cemme aurait voulu Lamusse, il eut fallu des quintaux et des quintaux, et des prix invraisemblables.
C’était un bien brave homme ! Il semblait que dans ce corps robuste la vie ne dût jamais s’éteindre. Et ce pendant depuis bien des mois, nous le savions, il était miné par la maladie. Il n’y a pas bien longtemps je le rencontrai à Saint-Pierre où il était venu pour je ne sais quel procès qui se plaidait au palais de justice, dans lequel il n’était pas intéressé, mais les parties habitaient l’ile, et c’était un motif suffisant de sa présence. Je lui demandai de ses nouvelles : « Oh, ça va mieux maintenant, me dit-il, mais il n’était que temps.. . » Ses traits altérés démentaient ses paroles, mais quand il s’agissait de l’Ile aux Chiens, il n’y avait pas d’effort de volonté qu’il ne fasse.
Adieu, Jacques Lamusse, vous laisserez dans cette commune le souvenir d’un bon citoyen, d’un administrateur économe et sage. Le Chef de la colonie vous apporte ce témoignage qu’il est heureux de vous rendre, au seuil de l’ éternité où vous allez entrer.
Dormez en paix, dans ce petit cimetière où le bruit de la mer vous bercera d’une voix amie, au milieu de concitoyens dont les intérêts vous étaient si chers !
Ephémérides du 11 mai 1892
Première réunion du Conseil municipal de l’Ile-aux-Chiens, M. Jacques Lamusse est élu maire avec MM. Jouvin, Jouvin et Plaine, Pierre, comme adjoints, M. Pinson, secrétaire de la Mairie.
MAIRIE DE L’ILE AUX CHIENS
AVIS
Le public est informé que conformément aux prescriptions de la loi du 5 avril 1884, M. Jouvin, Jouvin, 1° adjoint de la Commune de l’Ile aux Chiens, remplit provisoirement les fonctions de Maire de ladite Commune en remplacement de M. Lamusse, décédé.
MAIRIE DE L’ILE AUX CHIENS
AVIS
Dans sa session extraordinaire du 7 décinlre 1898 le Conseil municipal de l’Ile aux Chiens a cédé à l’élection du Maire en remplacement de M. Lamusse, decédé. – Au 1° tour de scrutin M. Choplin, Louis, a été élu par 9 voix sur douze votants.