Accord relatif aux relations réciproques entre le Canada et la France en matière de pêche
F103063 – RTC 1979 No 37
LE GOUVERNEMENT CANADIEN ET LE GOUVERNEMENT FRANÇAIS,
CONSIDÉRANT que le Gouvernement canadien a jugé nécessaire, en vue notamment d’assurer la protection de ses pêcheries, d’adopter certaines dispositions relatives à la délimitation de la mer territoriale et des zones de pêche du Canada,
ESTIMANT opportun d’adapter à la situation actuelle leurs relations réciproques en matière de pêche,
SONT CONVENUS de ce qui suit :
Article 1
Le Gouvernement français renonce aux privilèges établis à son profit en matière de pêche par la convention signée à Londres le 8 avril 1904 entre le Royaume-Uni et la France. Le présent accord remplace les dispositions conventionnelles antérieures relatives à la pêche des ressortissants français au large de la côte atlantique du Canada.
Article 2
En contrepartie, le Gouvernement canadien s’engage, dans le cas de changement au régime juridique des eaux situées au delà des limites actuelles de la mer territoriale et des zones de pêche du Canada sur la côte atlantique, à reconnaître aux ressortissants français le droit de pêche dans ces eaux, sous réserve d’éventuelles mesures de conservation des ressources, y compris l’établissement de quotas. Le Gouvernement français s’engage de son côté à accorder la réciproque aux ressortissants canadiens au large de Saint Pierre et Miquelon.
Article 3
Les bâtiments de pêche immatriculés en France métropolitaine pourront continuer à pêcher, du 15 janvier au 15 mai de chaque année, jusqu’au 15 mai 1986, sur un pied d’égalité avec les bâtiments canadiens dans la zone de pêche canadienne à l’intérieur du golfe du Saint Laurent à l’est du méridien 61E 30’ de longitude ouest, conformément aux dispositions des articles 5 et 6.
Article 4
En raison de la situation particulière de Saint Pierre et Miquelon et à titre d’arrangement de voisinage :
- les embarcations de pêche côtière françaises immatriculées à Saint Pierre et Miquelon peuvent continuer à pêcher dans leurs lieux de pêche traditionnels sur les côtes de Terre-Neuve, et les embarcations de pêche côtière de Terre-Neuve bénéficient du même droit sur les côtes de Saint Pierre et Miquelon,
- les chalutiers français d’une taille maximum de 50 mètres immatriculés à Saint Pierre et Miquelon peuvent, dans la limite d’une dizaine, continuer à pêcher sur les côtes de Terre-Neuve, de la Nouvelle-Écosse (à l’exception de la Baie de Fundy), et dans la zone de pêche canadienne à l’intérieur du golfe du Saint Laurent, sur un pied d’égalité avec les chalutiers canadiens; les chalutiers canadiens immatriculés dans les ports de la côte atlantique du Canada peuvent continuer à pêcher sur les côtes de Saint Pierre et Miquelon sur un pied d’égalité avec les chalutiers français.
Article 5
Les bâtiments de pêche français visés par les dispositions de l’article 3 ne doivent pas faire porter leur effort de pêche à titre principal sur des espèces de poisson autres que celles qu’ils ont traditionnellement exploitées dans la période de cinq ans précédant immédiatement cet accord, et ne devront pas augmenter substantiellement le niveau de cet effort.
Article 6
- Les règlements de pêche canadiens seront appliqués sans discrimination de fait ni de droit aux bateaux de pêche français visés aux articles 3 et 4, y compris les règlements portant sur la taille des bateaux autorisés à pêcher à moins de 12 milles de la côte atlantique du Canada.
- Les règlements de pêche français seront appliqués dans les mêmes conditions aux bateaux de pêche canadiens visés à l’article 4.
- Avant de promulguer de nouveaux règlements applicables à ces bateaux, les autorités de chacune des Parties en aviseront les autorités de l’autre Partie trois mois à l’avance.
Article 7
Le patrouilleur français qui accompagne habituellement les bâtiments de pêche français pourra continuer à exercer sa mission d’assistance dans le golfe du Saint Laurent.
Article 8
La ligne définie à l’annexe au présent accord détermine, entre Terre-Neuve et les îles de Saint Pierre et Miquelon, la limite des eaux territoriales du Canada et des zones soumises à la juridiction de pêche de la France.
Article 9
Aucune disposition du présent accord ne peut être interprétée comme portant atteinte aux vues et prétentions futures de l’une ou l’autre partie concernant les eaux intérieures, les eaux territoriales ou la juridiction en matière de pêche ou de ressources du plateau continental, ni aux accords bilatéraux ou multilatéraux auxquels l’un ou l’autre gouvernement est partie.
Article 10
- Les parties contractantes établiront une Commission pour l’examen de tous les différends sur l’application du présent accord.
- La Commission comprendra un expert national nommé par chacune des parties pour dix ans. En outre, les deux gouvernements désigneront d’un commun accord un troisième expert qui ne sera pas un ressortissant de l’une ou l’autre partie.
- Si, à l’égard de tout différend soumis à la Commission par l’une des parties contractantes, la Commission n’est pas parvenue, dans un délai d’un mois, à une décision acceptable pour les parties contractantes, il sera fait appel au troisième expert. La Commission siègera alors comme un tribunal d’arbitrage sous la présidence du troisième expert.
- Les décisions de la Commission siégeant comme un tribunal d’arbitrage seront prises à la majorité et seront obligatoires pour les parties contractantes.
EN FOI DE QUOI les soussignés, dûment autorisés à cet effet par leurs gouvernements respectifs, ont signé le présent Accord et y ont apposé leurs sceaux.
FAIT en deux exemplaires à Ottawa, en langues anglaise et française, chaque version faisant également foi, ce 27ième jour de mars 1972.
Mitchell Sharp
POUR LE GOUVERNEMENT DU CANADA
Pierre Siraud
POUR LE GOUVERNEMENT DE LA FRANCE
Annexe à l’Accord entre le Canada et la France
La ligne qui détermine la limite des eaux territoriales du Canada et les zones soumises à la juridiction de la France en matière de pêches s’étend dans la direction du nord et de l’ouest en formant une série de huit lignes droites rattachées les unes aux autres et reliant les points suivants :
- Point (1) Equidistant de 12 milles marins de l’Enfant Perdu ( France ) et de Lamaline Shag Rock ( Canada ). Latitude : 46° 38’ 46”N., longitude : 55° 54’ 12” O., approximativement.
- Point (2) Equidistant de l’Enfant perdu (France) et de Lamaline Shag Rock et d’Otter Rock (Canada). Latitude : 46° 41’ 56”N., longitude : 55° 55’ 28” O., approximativement.
- Point (3) Equidistant de l’Enfant Perdu (France) et d’Otter Rock et de l’Enfant Perdu (Canada). Latitude : 46° 48’ 10”N., longitude : 55° 58’ 57” O., approximativement.
- Point (4) Ligne des basses eaux au point situé le plus au sud-ouest de l’Enfant Perdu (Canada). Latitude : 46° 51’ 20” N., longitude : 56° 05’ 30”O., approximativement.
- Point (5) Ligne des basses eaux à l’extrémité ouest de l’île située le plus au sud-ouest du groupe de Little Green Islands, Latitude : 46° 51’ 36” N., longitude : 56° 05’ 58” O., approximativement.
- Point (6) Intersection de la ligne française du chenal de 1907 et d’une ligne parallèle à une autre ligne qui, à 3 milles de distance, joint Green Island à Dantzig Point. Latitude : 46° 55’ 52” N., longitude : 56° 07’ 47” O., approximativement.
- Point (7) Intersection de la ligne française du milieu du chenal de 1907 et de la ligne médiane, équidistante du Bout du Nordet (France) et de Little Plate Island (Canada). Latitude : 47° 06’ 02” N., longitude : 56° 06’ 18” O., approximativement.
- Point (8) Equidistant de Cap du Nid à l’Aigle (France) et de Little Plate Island et de l’îlot sud-ouest des Wolf Rocks (Canada). Latitude : 47° 18’ 19” N., longitude : 56° 15’ 18” O., approximativement.
- Point (9) Intersection de la ligne française du milieu du chenal de 1907 et de la limite extérieure de la mer territoriale de 12 milles du Canada. Latitude : 47° 21’ 54” N., longitude : 56° 29’ 40” O., approximativement.
II
L’Ambassadeur de France au Secrétaire d’État aux Affaires extérieures
OTTAWA, le 27 mars 1972
L’Honorable Mitchell Sharp
Secrétaire d’État aux Affaires Extérieures
Ottawa, Ontario
Monsieur le Ministre,
J’ai l’honneur de vous faire savoir qu’il a été porté à la connaissance du Gouvernement français que certains navires se trouvant dans le Golfe du Saint-Laurent avaient rencontré quelques difficultés administratives au moment d’emprunter le détroit de Belle-Isle.
Le Gouvernement français reconnaît que les navires de pêche appelés à utiliser cet itinéraire seront soumis à la réglementation canadienne des pêches et de la pollution qui y est applicable, et invitera ses ressortissants à en observer strictement les dispositions.
Il considère que, sous la seule réserve qui précède, les navires de pêche français ont à tout moment le droit de passage inoffensif dans le détroit de Belle-Isle.
Je saisis cette occasion pour vous renouveler, Monsieur le Ministre, l’assurance de ma très haute considération.
Pierre Siraud
Ambassadeur de France
III
Le Secrétaire d’État aux Affaires extérieures à l’Ambassadeur de France
Ottawa, le 27 mars, 1972
Son Excellence Monsieur Pierre Siraud
Ambassadeur de la France,
OTTAWA
Monsieur l’Ambassadeur,
J’ai l’honneur d’accuser réception de votre lettre du 27 mars 1972, dont le texte est libellé de la façon suivante :
« Il a été porté à la connaissance du Gouvernement français que certains navires se trouvant dans le Golfe du Saint-Laurent avaient rencontré quelques difficultés administratives au moment d’emprunter le détroit de Belle-Isle.
« Le Gouvernement français reconnaît que les navires de pêche appelés à utiliser cet itinéraire seront soumis à la réglementation canadienne des pêches et de la pollution qui y est applicable, et invitera ses ressortissants à en observer strictement les dispositions.
« Il considère que, sous la seule réserve qui précède, les navires de pêche français ont à tout moment le droit de passage inoffensif dans le détroit de Belle-Isle. »
En vous remerciant de cette aimable communication, je confirme que les navires de pêche français ont en tout temps le droit de passage inoffensif dans le détroit de Belle-Isle sous réserve de la condition énoncée dans votre lettre.
Veuillez agréer, Monsieur l’Ambassadeur, les assurances de ma très haute considération.
Mitchell Sharp
Le Secrétaire d’État aux affaires extérieures